Un sujet fiscal : La réforme allemande du droit de succession : nouvelles limites

Le 9 novembre 2016 a été promulguée la nouvelle loi allemande sur le droit de successions et les donations d’entreprises (Erbschaftsteuergesetz) avec effet rétrospectif à compter du 1er Juillet 2016.

Cet article fait suite à notre dernier article sur le projet de réforme dans la French Newsletter N° 15 (Novembre 2016).

Après plusieurs années de fortes discussions qui ont suivi la jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgericht), la nouvelle loi allemande sur le droit de successions et les donations d’entreprises (Erbschaftsteuergesetz) a été publiée en fin d’année 2016. Cette loi a pour but de réduire les inégalités entre entreprises à petit patrimoine et à gros patrimoine (plus de 26 millions d’euros) lors de l’héritage ou du don. Les nouvelles règles visent à empêcher l’accès injustifié aux avantages fiscaux et limitent également les possibilités d’évasion fiscale lors de la succession.

La règlementation favorisant la transmission du patrimoine professionnel selon la loi sur le droit de successions prévoit une exonération des biens affectés à l’exploitation d’activités industrielles, commerciales, artisanales ou agricoles ainsi que des parts sociales et actions dans les sociétés à petit et moyen patrimoine.

Qu’est ce qui a changé ?

  • Un modèle dégressif : Dans le régime de base, 85% (ou 100% dans le régime optionnel) de la valeur des biens transmis dans une entreprise est déduite de l’assiette fiscale à partir de laquelle est calculée l’imposition. La nouvelle loi a introduit un seuil pour les entreprises de 26 millions d’euros et plus. Les avantages fiscaux lors de la succession d’une entreprise restent les mêmes pour les entreprises ayant une valeur de moins de 26 millions d’euros, c’est à dire 85% de réduction si le repreneur continue de gérer l’entreprise tout en maintenant les emplois pendant 5 ans et 100% si il le fait sur 7 ans. À partir d’une valeur d’entreprise de plus de 26 millions d’euros s’applique désormais un modèle d’exonération dégressif jusqu’à 90 millions d’euros. Passé ce seuil, le repreneur ne bénéficiera plus d’avantages.
  • Le seuil pour les entreprises devant respecter la règle liée à la masse salariale (Lohnsummenregelung) passe de 20 salariés à 5. Avant la réforme, la condition d’exemption au regard de la masse salariale (Lohnsummenregelung) n’était applicable qu’aux entreprises de 20 salariés ou plus (Arbeitsnehmergrenze).
  • Une exception : si le repreneur d’une entreprise valorisée à plus de 26 millions d’euros peut démontrer qu’il lui faut investir plus de 50% de sa fortune personnelle pour payer l’impôt, alors il pourra profiter des réductions fiscales à taux plein, il lui faudra pour cela dévoiler l’intégralité de son patrimoine aux autorités fiscales allemandes.
  • Si le paiement du droit de succession provient de la fortune personnelle : un délai de paiement de 7 ans peut être accordé, la première année ne nécessite pas de remboursement et profite d’un taux à 0%. Il faudra ensuite payer au minimum 1/6ème de la somme chaque année avec un taux à 6%.
  • La valeur de l’entreprise : elle était jusqu’à maintenant calculée grâce au taux d’actualisation avec un facteur de capitalisation d’environ 18 (17,8571), ce qui donnait des valeurs n’étant pas adaptées à la valeur réelle lorsque les taux d’intérêt étaient bas. Il sera désormais calculé avec un facteur de capitalisation de 13,75, ajusté en fonction de l’évolution des taux d’intérêts.
  • La différenciation entre patrimoine profitant de l’exonération et patrimoine exclu de l’exonération est conservée. Le patrimoine administratif n’est désormais comptabilisé comme patrimoine bénéficiant de l’exonération qu’à hauteur de 10%.
  • Taux de patrimoine administratif : dans le régime de base l’exonération fiscale ne s’applique pas dans le cas où le patrimoine administratif représente plus de 90% du patrimoine total. Dans le régime optionnel le taux de patrimoine administratif maximal est de 20%.
  • Le calcul du patrimoine administratif (Verwaltungsvermögen) : ce calcul est revu afin d’empêcher l’évasion fiscale. La base d’imposition est désormais l’actif net, qui se calcule en affectant la totalité des dettes proportionnellement au patrimoine profitant des avantages et à celui n’en profitant pas. De plus, le calcul de l’actif net sera calculé de manière consolidée dans les groupes à structure en cascade.
  • Le test de calcul des ressources financières a été modifié : lors du calcul des ressources financières (Finanzmitteltest), 15% de la valeur de l’entreprise est déduite si celle-ci a comme activité le commerce, une profession libérale ou qu’elle fasse partie du domaine agricole. Cette nouvelle règle a pour but de contribuer à l’action du Bundesrat contre les Cash-GmbH (sociétés servant uniquement à faire circuler des actifs financiers afin de profiter des avantages destinés à la succession d’entreprise)
  • Élargissement de la définition du patrimoine administratif : les oeuvres d’art, les collections de timbres, les voitures de collection, les yachts et les autres objets appartenant à l’entreprise et à usage privé en font désormais partie. Une exception existe si l’activité principale de l’entreprise est liée à ces objets.
  • Les investissements à titre posthume : les investissements prévus par le défunt bénéficieront désormais d’une réduction fiscale si l’investissement dans des biens favorisés par la loi est réalisé dans les 2 ans après la mort.

Focus sur les entreprises familiales

Les entreprises familiales représentent un cas particulier dans cette réforme en raison de leur place majeure dans l’économie allemande. Elles bénéficient ainsi d’une réduction si leurs statuts prévoient certaines clauses spécifiques , celles-ci devant être appliquées 2 ans avant la succession et 20 ans après. Dans ce contexte, il est nécessaire de revoir et de modifier, le cas échéant, les statuts et les contrats si les stipulations dans les documents juridiques ne correspondent pas aux dispositions de la nouvelle loi.

L’une des conditions majeures pour profiter des avantages fiscaux est la redistribution au maximum de 37,5% des bénéfices après paiement des impôts (les prélèvements pour le paiement d’impôts en retard ne sont pas pris en compte). Les clauses donnant des droits exclusifs aux membres de la famille ou aux proches faisant partie de l’entreprise sont également l’un des déterminants de l’exonération. La réduction sur la valeur de l’entreprise familiale dépend du statut, du contrat d’entreprise et des réductions qui ont été négociées, le pourcentage maximum étant de 30% de la somme de départ.

Auteur

Maxime Choain

Sources

  • http://www.zeit.de/politik/deutschland/2016-10/erbschaftsteuerreformbundesrat- zustimmung 
  • https://www.bundesregierung.de/Content/DE/Artikel/2016/09/2016-09-29- erbschaftsteuer-reform-beschlossen.html 
  • http://www.focus.de/finanzen/steuern/erbschaftsteuer/erbschaftsteuerreform- das-sind-die-neuen-regeln_id_5979976.html http://www.focus.de/politik/videos/debatte-um-erbschaftssteuer-deutschlanddeine- neid-gesellschaft-wir-brauchen-mehr-steuern-nach-dem-tod_id_4541952.html 
  • http://intranet.intern.business/uploads/cc-marke-ting/1.2.5%20 Mandanteninformation/2016/Mandanteninformation_Erbschaftsteuerreform_DE.pdf 
  • http://www.iww.de/gstb/archiv/erbschaftsteuer-zu-vielverwaltungsvermoegen- kann-teuer-werden-f26858